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« Les temps sont durs pour les femmes progressistes »

Phumzile Mlambo-Ngcuka Directrice exécutive d’ONU Femmes

13 mars 2017 ONU CSW61 Réunion des ONG

La 61e session de la commission de la condition des femmes (CCF/CSW) de l’ONU a porté cette année sur l’autonomisation économique des femmes dans un monde du travail en mutation.

La délégation de Regards de Femmes comprenait Catherine Aubry, Nicole Bez, Patricia Jullien et Michèle Vianès. Pascale Crozon, députée du Rhône, présente à la CSW était également à nos côtés. (photo).

8600 activistes ont participé à la CCF/CSW aux côtés des représentants des Etats et des entités onusiennes. Le terme « activiste » volontairement utilisé plutôt que le terme « féministe » parce que la présence « des ennemis des droits des femmes » pour reprendre l’expression de Phumzile Mlambo-Ngcuka, directrice exécutive d’ONU Femmes, n’a jamais été aussi nombreuse et visible. Le programme des Side-events l’illustre précisément : L’Organisation de la conférence islamique en programmait tous les jours et même plusieurs par jour, idem pour les intégristes catholiques et les évangélistes.

Lors de la première réunion pour les ONG françaises, (photo) à la mission permanente de la France à l’ONU, en présence de la Ministre Laurence Rossignol, l’Ambassadeur Delattre a confirmé que le nouveau Secrétaire Général de l’ONU, Antonio Guttires, était conscient des vents contraires dans le monde sur les droits des femmes et extrêmement vigilant.

REUNIONS DE DEBRIEFING DES ONG


Secretary-General António Guterres at the 61st session of the UN Commission on the Status of Women. UN Women/Ryan Brown

Sa présence le vendredi 17 mars à la réunion des ONG le confirme. (photo) C’est la première fois que le Secrétaire Général de l’ONU participe à la réunion matinale de débriefing des ONG. Consultez l’article (en anglais) sur l’intervention de Mr Antonio Guttires sur le site d’ONU Femmes.

Pour le Secrétaire général la parité à tous les niveaux, objectif central, est la bataille à mener. Personne ne veut perdre les positions détenues depuis longtemps. Lorsqu’il était Premier Ministre du Portugal son combat le plus difficile avait été d’inscrire la lutte contre les violences envers les femmes dans l’agenda gouvernemental. Questionné sur la traite des êtres humains, il pense que les politiques s’investissent contre le trafic de drogue parce que leurs enfants risquent d’en être victimes alors qu’ils n’ont pas cette crainte concernant les trafics d’êtres humains.

La veille, Phumzile Mlambo-Ngcuka, directrice exécutive d’ONU Femmes, lors de la réunion des ONG a déclaré « Les temps sont durs pour les femmes progressistes dans les pays hostiles aux droits positifs des femmes. Les ennemis sont très nombreux et il est important de savoir qui sont les ennemis des droits des femmes… 150 pays [sur 176 pays] ont des législations contraires aux droits universels des femmes, affectant 3 milliards de femmes et filles dans le monde. »

Michèle Vianès l’a interrogé sur le droit à l’avortement légal et sécurisé pour les femmes et les filles partout dans le monde. (photo) Sa réponse a confirmé nos craintes. C’est la barrière la plus difficile à soulever, celle contre laquelle les alliances entre les pays hostiles aux droits des femmes sont les plus profondes et les oppositions les plus enracinées dans les mentalités.

SIDE ET PARALLEL EVENTS


L’atelier de Regards de Femmes « Les crises et les femmes fenêtres d’opportunités ou menaces de régression » fut extrêmement riche et intéressant. Les panélistes ont présenté des bonnes pratiques pour le renforcement du leadership et de la participation des femmes, l’élargissement des possibilités dans le monde du travail, l’accès à un travail décent avec la mise en place de cadres normatifs et juridiques. Voici le lien pour les actes.

Michèle Vianès était invitée en tant que panéliste lors de l’atelier organisé par ONEF Côte d’Ivoire, avec la participation de Mariatou KONE, Ministre Ivoirienne des droits des femmes pour échanger sur «  La sensibilisation et la mobilisation des ressources contre  le cancer du sein ».

Michèle Vianès a présenté les actions de sensibilisation, de prévention et de soutien aux soins de support de Courir pour ELLES à Lyon. Catherine Aubry, médecin généraliste, a répondu aux interrogations médicales des personnes présentes.

Nous avons également participé aux réunions organisées par la France en présence de la Ministre Laurence Rossignol (photo).

Lors de celle organisée sur l’autonomisation économique des femmes leviers clés pour un développement durable »

Michaëlle Jean, Secrétaire générale de la francophonie a déclaré « Nous n’avons plus le temps de prendre notre temps. Le temps presse. Les femmes n’en peuvent plus d’être dans l’informel. Il faut briser les solitudes, échanger les bonnes pratiques, unir nos voix pour un plaidoyer solide et ouvrir le champ des possibles dans les 5 continents »

Laurence Rossignol a rappelé l’affirmation politique de la France : culture de l’égalité et prise en compte de la dimension genre à l’ensemble des projets d’aide au développement.

Yanick Glemarec, directeur exécutif adjoint d’ONU Femmes, a rappelé l’inclusion financière des femmes dans 7 des 17 objectifs du développement durable d’ici 2030 et a soulevé la question d’absence de documents officiels d’état civil pour l’accès aux comptes bancaires.

Michèle Vianès a échangé avec lui sur la question de la non-déclaration des naissances.

Nous avons également participé aux réunions organisées par le réseau francophone pour l’égalité femmes- hommes. Lors de l’atelier « Les nouveaux défis de l’égalité femmes-hommes dans l’espace francophone » le Dr Morissanda Kouyate (Comité Inter africain) a dénoncé la persistance des mutilations génitales féminines (16 pays sur les 29 qui la pratiquent sont francophones). Il a vivement dénoncé les effets pervers de la médicalisation. Kafui Johnson de Wildaf a dénoncé la persistance des pratiques préjudiciables, en particulier du mariage précoce. L’étude faite au Mali (cf. intervention de Kelly Djire lors de notre atelier),  au Niger (69%  des filles) et au Togo (78 % des filles) montre les conséquences désastreuses : déscolarisation, féminisation de la pauvreté, absence d’estime de soi, reproduction des inégalités, subordination des femmes aux hommes, etc.

Soukeina Bouraoui (CAWTAR) a présenté l’enquête SAHWA concernant la jeunesse arabo-méditerranéenne, « bombe à retardement », peu ou mal préparée aux responsabilités. Les ¾ vivent dans des situations de conflits ou de guerres. L’alibi de la religion a une double fonction : mettre les femmes en dehors de la modernité et faire peur selon le principe plus on fait peur plus on a de pouvoir. Les jeunes sont dans une grande confusion entre cultures, traditions et religions. 70% veulent quitter leur pays, les hommes pour des raisons économiques, les femmes pour avoir accès à la liberté.

CONCLUSIONS AGRÉÉES


https://www.ngocsw.org/wp-content/uploads/2017/03/Agreed-Conclusions.pdf

Evidemment les négociations ont été très difficiles. 1/3 des conclusions n’ont pas trouvé l’accord de tous les Etats, avec des clauses de souveraineté et de spécificité nationale. Cela ne s’était jamais vu. Les Etats-Unis ont refusé le langage agréé sur les droits reproductifs et sexuels.  La question du droit à un avortement, sûr et légal, a été le catalyseur de tous les régressifs, y compris dans l’Union Européenne. Des critiques très vives également du côté des BRIC, des pays Africains et d’Amérique latine.

L’UE s’est retrouvée isolée politiquement. La France après l’adoption des conclusions a fait une déclaration sur les Droits reproductifs et sexuels approuvée par 21 membres de l’UE (Royaume Uni compris).